Webinaire du GRIIP - Cerner les composantes de l'innovation pédagogique

Ce webinaire marque le lancement officiel de la troisième édition du concours Lumière sur l'innovation pédagogique, organisé par le Groupe d'intervention et d'innovation pédagogique (GRIIP) du réseau de l'Université du Québec. L'objectif principal est de valoriser les pratiques innovantes qui contribuent à l'amélioration de la qualité de l'enseignement et de l'apprentissage dans le milieu universitaire. La conception retenue pour le concours réfère aux changements apportés aux pratiques des enseignants ou des équipes pédagogiques dans le but de les optimiser et de favoriser les apprentissages. Les personnes membres du corps enseignant ou du personnel professionnel ayant innové au cours des cinq dernières années sont cordialement invitées à déposer un dossier de candidature simple avant la date limite du 22 novembre.

Michel Foret a introduit le concours, insistant sur la nécessité de mettre en lumière des pratiques novatrices. Les conférenciers invités pour approfondir la réflexion sur les composantes de l'innovation pédagogique sont Madame Dianne Leduc, professeure titulaire spécialisée en enseignement supérieur, et Monsieur Martin Riopel, titulaire de la chaire de recherche en innovation pédagogique. Le webinaire explorera diverses définitions pour cerner les éléments essentiels de l'innovation, notamment en répondant à des questions fondamentales comme la signification à attribuer à ce concept et ses effets réels sur l'apprentissage.

L'impulsion d'innover provient de plusieurs facteurs contextuels : l'évolution rapide des pratiques d'enseignement, exacerbée par l'intelligence artificielle (IA), la profusion des écrits théoriques et l'injonction sociale, notamment post-pandémie, de se réinventer. Il est cependant noté que l'urgence peut favoriser la faisabilité spontanée au détriment de la qualité ou de la validité des changements introduits. La complexité conceptuelle du terme rend difficile la distinction entre innovation, évolution ou simple progression. Les raisons profondes d'innover en évaluation, par exemple, incluent la persistance des inégalités, la nécessité de renouveler les pratiques face aux avancées technologiques et les bouleversements sociétaux en cours.

L'innovation doit servir prioritairement à améliorer l'apprentissage des étudiants, tout en offrant un nouveau regard sur les résultats obtenus. Selon Françoise Côté, une personne innovante s'investit avec énergie, prend des risques, accumule les essais et les erreurs et joue avec l'incertitude. Cette démarche implique la déconstruction et la reconstruction de la pratique enseignante, s'inscrivant dans une perspective humaniste axée sur le bien-être et l'adaptation aux divers contextes d'enseignement.

Bien sûr quand il y a urgence, ça génère de la créativité mais souvent ce que ça fait aussi c'est que ça favorise davantage la faisabilité et l'applicabilité spontanée et parfois au détriment justement de la qualité.

Historiquement, l'innovation pédagogique a été perçue avec méfiance, menaçant parfois l'ordre établi, mais elle est aujourd'hui généralement bien vue. Les recherches francophones et anglophones ont identifié des centaines de définitions, rendant l'élaboration d'une théorie générale spéculative. Souvent, l'innovation est communiquée sous forme de retour d'expérience, privilégiant l'efficacité immédiate et le « ici et maintenant » plutôt que l'ancrage théorique, ce qui peut générer une distance conceptuelle avec les chercheurs.

L'exercice conceptuel vise à dégager un consensus sur les composantes essentielles de l'innovation en analysant collectivement plusieurs définitions issues de la littérature. Les premiers retours d'un sondage participatif ont mis en évidence des termes centraux tels que la nouveauté, la créativité, le dynamisme et l'idée d'approfondissement. Une réflexion importante concerne l'échelle de la nouveauté : un changement peut être nouveau pour un individu, mais pas pour une équipe ou une institution. De plus, l'idée de processus, qui s'étale dans le temps, est apparue comme un élément structurant de la démarche innovante.

Les définitions ultérieures, comme celle de Béchard et Pelletier (2001), soulignent la nécessité d'améliorer substantiellement les apprentissages. Côté (2004) introduit la notion de changement selon une action finalisée, portée par les intentions et valeurs des innovateurs. Il est crucial de distinguer l'innovation du simple changement : toute innovation est un changement, mais tout changement n'est pas une innovation, car ce dernier doit induire une rupture profonde avec les pratiques antérieures. La définition du GRIIP met l'accent sur les changements visant à favoriser les apprentissages, bien que des participants aient noté l'absence explicite des notions de nouveauté et de prise de risque dans cette formulation.

Une innovation pédagogique produit un changement profond chez l'enseignant et l'apprenant de type conscient, volontaire, intentionnel et libéré.

Une proposition de définition synthétique émerge de l'analyse, décrivant l'innovation pédagogique comme un processus dynamique et délibéré visant à introduire de la nouveauté dans une culture et un environnement d'apprentissage donnés. Elle doit être un vecteur de changement soutenu par des valeurs d'amélioration substantielle de l'apprentissage. Au-delà des composantes classiques (nouveauté, valeur ajoutée, changement), il est essentiel d'intégrer le travail réflexif : l'innovation doit amener un regard attentif et critique sur ses propres actions, permettant une prise de conscience et une évolution de la pratique.

La différence entre rénovation et innovation réside dans l'ampleur de la déconstruction. La rénovation consiste à retravailler ce qui existe déjà en y portant un regard différent, tandis que l'innovation implique souvent une déconstruction pour reconstruire. Cependant, ces deux concepts ne sont pas nécessairement disjoints ; un processus d'innovation peut débuter par une étape innovante, puis évoluer vers des étapes de peaufinage et d'ajustement qui s'apparentent à la rénovation.

Pour observer l'innovation, il est nécessaire de créer des échelles de mesure. La question de l'échelle est primordiale : un changement de pratique peut être une nouveauté à l'échelle individuelle mais pas à l'échelle institutionnelle. De plus, le processus d'innovation est caractérisé par son cycle, qui peut être linéaire ou cyclique, impliquant des étapes successives d'identification du problème, de prise de conscience (point de bascule) et d'expérimentation. Le moment de la transmission et de la diffusion des résultats est identifié comme un point de maturité gratifiant, posant la question de savoir si une innovation non partagée constitue toujours une innovation.