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    Afrique, point chaud de la guerre froide | Les coulisses de l'histoire | ARTE

    Valuable insights

    1.L'Afrique, théâtre méconnu de la Guerre Froide: Le conflit mondial entre l'URSS et les États-Unis ne s'est pas limité à l'Europe et à l'Asie ; l'Afrique est devenue un champ de bataille géostratégique crucial pour l'influence.

    2.Bandung marque l'éveil du Tiers-Monde: La conférence de Bandung en 1955 a symbolisé l'irruption des nations nouvellement indépendantes d'Afrique et d'Asie sur la scène internationale, cherchant à s'affranchir des puissances dominantes.

    3.Nkrumah utilise la concurrence pour le développement: Le président ghanéen Kwame Nkrumah a habilement joué sur la rivalité américano-soviétique pour obtenir des financements pour des projets d'infrastructure majeurs, comme le barrage du lac Volta.

    4.La crise congolaise révèle la brutalité de la confrontation: L'indépendance du Congo en 1960 a immédiatement dégénéré en crise sécessionniste, instrumentalisée par les blocs pour contrôler les ressources stratégiques comme l'uranium du Katanga.

    5.L'assassinat de Lumumba parrainé par l'Occident: Suite à son rapprochement avec Moscou, Patrice Lumumba fut destitué et assassiné, l'objectif américain étant d'écarter toute influence communiste et d'installer un pion pro-occidental, Mobutu.

    6.L'URSS investit massivement dans le soft power: Moscou a séduit de nombreux dirigeants africains en offrant une formation idéologique et technique, notamment via l'Université Patrice Lumumba, pour étendre son influence idéologique.

    7.Les modèles socialistes africains échouent souvent: Les tentatives d'application de modèles collectivistes, comme en Éthiopie sous Mengistu, ont mené à des catastrophes humaines, notamment des famines massives, discréditant l'idéologie soviétique.

    8.Le retrait soviétique est motivé par l'économie interne: Sous Mikhaïl Gorbatchev, les difficultés économiques de l'URSS ont forcé un retrait stratégique d'Afrique, la priorité étant donnée aux relations avec l'Europe et les États-Unis.

    9.La fin de la Guerre Froide redessine les cartes africaines: La chute du communisme a entraîné l'abandon des alliés anticommunistes par Washington (Mobutu, Savimbi) et la promesse de l'ANC d'abandonner le socialisme en Afrique du Sud.

    L'émergence du Tiers-Monde et l'Indépendance Africaine

    L'histoire, loin d'être une science exacte, nécessite une remise en question constante des certitudes établies pour décrypter la réalité mondiale. Dans la mémoire collective, la Guerre Froide est souvent circonscrite au conflit entre l'URSS et les États-Unis en Europe et en Asie. Pourtant, le 18 avril 1955, la ville de Bandung, en Indonésie, devient le centre névralgique du monde. Trente chefs d'État africains et asiatiques s'y réunissent pour une conférence intercontinentale marquante, annonçant l'émergence fracassante du Tiers-Monde sur la scène internationale. Ces nations émergentes, libérées du joug colonial après la Seconde Guerre mondiale, doivent désormais trouver leur voie dans un ordre mondial polarisé par la rivalité américano-soviétique.

    L'Indépendance du Ghana

    Mars 1957 voit Accra, capitale de l'ancienne colonie britannique, célébrer l'indépendance du Ghana. L'artisan de cette émancipation, le docteur Kwame Nkrumah, économiste de formation et militant anticolonial, porte le rêve de sortir son pays du sous-développement par la modernisation. Cependant, cette ambition se heurte à la réalité d'un continent exploité pendant plus d'un siècle par les puissances européennes (Grande-Bretagne, France, Belgique, Espagne, Portugal), qui ont pillé les hommes et les richesses locales.

    • L'exploitation massive des ressources humaines et naturelles.
    • Le contrôle territorial strict par les métropoles européennes.
    • La destruction des cultures locales au profit des besoins européens.

    La Dilemme du Développement

    Dans les années 1950, l'Afrique se trouve dans une situation précaire. Les promesses de coopération issues de la conférence de Bandung ne se concrétisent pas en moyens économiques et technologiques suffisants pour la modernisation. Ces ressources indispensables se trouvent exclusivement aux États-Unis ou en Union Soviétique, deux puissances qui, depuis 1945, se disputent la domination mondiale et ont érigé un rideau de fer au milieu de l'Europe.

    Le Jeu des Superpuissances et la Stratégie de Nkrumah

    Les deux idéologies opposées rivalisent dans tous les domaines : économie, sport, culture et nucléaire, chacune cherchant à prouver la supériorité de son système pour l'exporter. Les Américains promettent la liberté et l'abondance, tandis que les Soviétiques offrent la justice sociale et le plan quinquennal. Il devient presque impossible pour les nouveaux États africains de ne pas choisir leur camp dans ce conflit global. Nkrumah, ancien étudiant aux États-Unis, se tourne initialement vers Washington pour financer un projet ambitieux de barrage sur le lac Volta, essentiel pour le réseau électrique ghanéen.

    Pour le président Eisenhower, les États africains émergents représentent de nouveaux marchés, des réservoirs de matières premières et des zones hautement stratégiques, une manne que l'Amérique ne veut surtout pas voir tomber dans l'escarcelle de Moscou.

    Le Jeu de la Concurrence

    Malgré la signature du projet de barrage, Nkrumah, de retour de Washington, contacte Moscou pour obtenir de l'aide pour un second projet, la construction d'une centrale hydraulique. Il est séduit par le modèle de croissance soviétique, basé sur le centralisme, la collectivisation et la mobilisation des masses. Cette manœuvre vise à empêcher une nouvelle forme de colonisation en jouant sur la concurrence entre les blocs. Le Kremlin, par l'intermédiaire de Nikita Khrouchtchev, voit dans ces nouvelles opportunités un avantage révolutionnaire à exploiter.

    Bloc
    Promesse Idéologique
    Mécanisme Économique
    États-Unis
    Liberté et Abondance
    Marchés et investissements privés
    Union Soviétique
    Justice Sociale
    Plan Quinquennal et centralisme

    Le président ghanéen déclare ouvertement que le capitalisme est trop complexe pour une nation fraîchement indépendante, justifiant ainsi le besoin d'une société socialiste. Ce rapprochement fait grincer des dents l'Oncle Sam, mais retirer l'aide reviendrait à livrer le Ghana aux bras du Kremlin. Nkrumah multiplie ainsi ses alliances, se tournant également vers la Chine et maintenant des relations avec ses anciens colons britanniques.

    La Crise Congolaise : Un Proxy de la Guerre Froide

    La méthode de Nkrumah trouve des émules sur le continent, notamment au Congo, ancienne colonie belge. Le 30 juin 1960, le Congo accède à l'indépendance, et Patrice Lumumba, ancien syndicaliste de 35 ans, devient Premier ministre. Emprunt d'idéalisme, son appel à une collaboration avec les Belges pour le service de la nation sonne comme un vœu pieux, car rien n'est structuré pour une transition réussie, et une partie des colons refuse de lâcher son pouvoir.

    Nous voulons constituer un gouvernement souverain où les Congolais et les Belges pourront travailler main dans la main au service de la nation congolaise.

    La Sécession du Katanga

    Cinq jours après l'indépendance, une mutinerie militaire dégénère en violences, provoquant l'exode massif des Blancs. Lumumba tente de reprendre le contrôle en épurant l'armée de ses officiers belges, mais il doit faire face à la sécession de la province du Katanga, riche en ressources. Le gouverneur Moïse Tshombé fait appel à des mercenaires. Cette crise est suivie de près par les deux superpuissances car le Katanga détient d'importantes réserves d'uranium, vitales pour leurs programmes nucléaires respectifs.

    • Contrôle des réserves d'uranium stratégiques pour le programme nucléaire.
    • Intervention militaire belge violant la souveraineté nationale.
    • Lutte entre les factions congolaises soutenues par les blocs rivaux.

    Face à l'agression belge, Lumumba saisit l'ONU, mais les Casques Bleus ne sont pas mandatés pour expulser les Européens. Acculé, Lumumba se tourne vers l'appui soviétique, voyant dans le Kremlin l'occasion de gagner un allié africain majeur. L'ouverture d'une ambassade soviétique à Léopoldville et la condamnation de l'ingérence belge font de Lumumba le symbole de la lutte contre l'impérialisme américain.

    Êtes-vous communiste, monsieur Lumumba ? Je suis simplement un nationaliste, un leader nationaliste qui lutte pour un idéal. Je ne suis pas du tout communiste.

    Ces paroles ne rassurent pas le camp occidental. Encouragés par Washington, les Belges soutiennent activement les sécessionnistes du Katanga. La CIA, alarmée par la perspective d'un régime sous influence communiste, prend une décision radicale. Le chef de la CIA, Allen Dulles, déclare : « L'éloignement de Lumumba est notre objectif le plus important. » Les États-Unis recrutent Joseph Mobutu, un haut gradé de l'armée, qui destitue Lumumba, le place en résidence surveillée, et expulse les Soviétiques. Lumumba est finalement livré aux rebelles du Katanga et assassiné le 17 janvier 1961.

    L'Expansion Soviétique et la Contre-Attaque Américaine

    La mort de Lumumba provoque une vague mondiale d'indignation, accusant les États-Unis d'assassinat. Simultanément, les discours virulents de Nkrumah au Ghana menacent même le financement de son barrage par Washington. Les États-Unis perdent la bataille des cœurs sur le continent, d'autant qu'ils soutiennent sans faillir l'Afrique du Sud et son régime d'apartheid, un système de ségrégation raciale stricte maintenu par une répression féroce.

    La Guerre des Images

    L'ANC, parti d'opposition noire interdit, cherche refuge et aide auprès de l'Union Soviétique, offrant au Kremlin l'occasion de dénoncer le racisme américain. Au début des années 1960, l'URSS jouit d'une excellente réputation, multipliant les projets et envoyant près de 40 000 ingénieurs et conseillers. L'Université de l'Amitié des peuples, renommée Université Patrice Lumumba, offre des bourses généreuses aux étudiants africains, formant une élite acquise à leur cause.

    • Formation de cadres pour l'ANC et autres mouvements.
    • Exploitation du racisme américain comme argument idéologique.
    • Offre de bourses substantielles à l'Université Patrice Lumumba.

    Face à ce rouleau compresseur, l'administration Kennedy réagit en lançant le programme des Peace Corps (P Corps), des volontaires envoyés en mission humanitaire pour dispenser des cours d'anglais et de médecine. Restaurer l'image américaine devient urgent, d'autant que la guerre du Vietnam freine la course à l'Afrique et réveille le spectre d'un colonialisme américain. Les États-Unis renoncent à de nouvelles aventures tropicales, concentrés sur l'Asie.

    Les Nouveaux Champs de Bataille : Angola et Éthiopie

    Dix ans après la première vague d'indépendances, la déception est palpable face aux leaders qui n'ont pas tenu leurs promesses de croissance sociale, certains, comme Nkrumah, ayant même basculé dans l'autoritarisme. Une nouvelle génération émerge, comme le général somalien Mohamed Siad Barré, qui prend le pouvoir par un coup d'État en 1969 et déclare la Somalie État socialiste. Géostratégiquement, la Somalie est précieuse pour contrôler les routes maritimes entre Suez et l'océan Indien, menant à un accord de coopération substantiel avec l'URSS en 1974.

    Le Choix de Moscou

    Simultanément, en 1974, le Portugal, dernière puissance coloniale, se démocratise et décide de se retirer de l'Angola. Le MPLA socialiste d'Agosto Neto prend le pouvoir en 1975, mais doit faire face aux factions rivales FNLA et UNITA, soutenues par les États-Unis et le Zaïre de Mobutu. Moscou, hésitant à provoquer Washington et à mettre en péril la politique de détente, choisit d'abord un soutien logistique. Cependant, lorsque les rebelles sont sur le point de prendre Luanda, Neto appelle à l'aide, et le Kremlin tranche en faveur de l'Éthiopie de Mengistu, malgré la situation géostratégique moins favorable de ce dernier.

    Critère
    Somalie (Siad Barré)
    Éthiopie (Mengistu)
    Idéologie
    Socialisme affiché, mais nationaliste pragmatique (liens avec USA/Chine)
    Marxisme-Léninisme pur, idolâtrie de Lénine
    Géostratégie
    Ports vitaux sur l'Océan Indien (très avantageux)
    Position terrestre stratégique pour l'Est africain
    Stabilité de l'Alliance
    Peu fiable, liens multiples
    Élève idéologiquement docile

    La guerre pour le désert de Gaden oppose les deux protégés. Fidel Castro intervient massivement pour sauver le MPLA en Angola, assurant la victoire cubano-soviétique en novembre 1975. En Éthiopie, malgré la terreur rouge de Mengistu, Moscou engage sa plus grande intervention militaire depuis la Corée, envoyant un milliard de dollars d'armement et le soutien de 11 000 soldats cubains, écrasant l'armée somalienne soutenue par les États-Unis.

    Le Déclin Soviétique et la Fin des Alliances

    Cette victoire soviétique en Éthiopie marque un point de non-retour dans la Détente, selon Zbigniew Brzezinski. À partir de 1981, Ronald Reagan, voyant l'URSS embourbée en Afghanistan, lance une nouvelle course à l'armement, la Guerre des Étoiles, pour porter le coup de grâce à l'Empire du Mal. Les Américains investissent dans la reconquête de l'Afrique, renouvelant leur soutien à Jonas Savimbi en Angola et maintenant des liens avec l'Afrique du Sud, bien que la pression interne américaine force une certaine distance vis-à-vis de l'apartheid.

    Le Poids de l'Échec Communiste

    Au milieu des années 1980, le bilan du communisme en Afrique est désastreux. En Éthiopie, la collectivisation des terres a provoqué une famine terrible, coûtant la vie à plus de 500 000 personnes dans la seule province de Wolo. À Moscou, la classe politique vieillissante ne peut plus soutenir l'érosion de son influence face à ses propres problèmes économiques. Sous Mikhaïl Gorbatchev, l'URSS commence son retrait stratégique, priorisant les bonnes relations avec l'Europe et les États-Unis.

    • L'échec économique interne de l'URSS.
    • Le bilan désastreux des politiques collectivistes en Afrique (famine éthiopienne).
    • La nécessité de normaliser les relations avec l'Occident comme priorité absolue.

    L'aveu d'échec est clair : « La majorité des pays en voie de développement ne souffrent pas tant du capitalisme que de son absence », déclare Andreï Kozyrev en 1988. Un an plus tard, la chute du mur de Berlin scelle la fin de l'expérience soviétique en Afrique. L'Amérique lâche alors ses pions anticommunistes, Mobutu au Zaïre et Savimbi en Angola, tandis que Mengistu abandonne le communisme en Éthiopie.

    L'Héritage et les Nouveaux Impérialismes

    En 1994, Nelson Mandela devient le premier président d'une Afrique du Sud démocratique, après 27 années de détention. Le journaliste Richard Kapuściński souligne que la Guerre Froide fut menée en Afrique d'une manière particulièrement brutale et cynique, sans que le continent ne puisse y faire grand-chose. La fin de cette confrontation donne à l'Afrique l'occasion de reprendre son destin en main, menant à la transformation de l'Organisation de l'Unité Africaine en Union Africaine en 2002, un nouvel outil de coopération politique et économique.

    La Menace des Nouveaux Impérialismes

    Aujourd'hui, le continent reste une proie pour les convoitises étrangères : Américains, Européens, Russes et Chinois investissent pour exploiter ses précieuses ressources. À l'occasion du 60e anniversaire de l'Union Africaine en 2023, son président met en garde contre un scénario dangereux : la menace de transformer l'Afrique en un nouveau terrain de bataille géostratégique. L'enjeu majeur réside dans la capacité du continent à résister à toute forme d'instrumentalisation pour éviter que l'histoire ne se répète sous de nouvelles formes d'impérialisme.

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